mercredi 21 avril 2010

TRUE COACH OF THE YEAR : JERRY SLOAN





"When's the last time we heard an impassioned crowd chanting, "C-O-Y! C-O-Y!'' as Brooks or Gregg Popovich or Phil Jackson made a pivotal late-game substitution?"


Jerry Sloan après 1190 victoires à la tête des Bulls et surtout du Jazz n’a jamais reçu le trophée du meilleur coach de l’année. Argument qui suffit à beaucoup pour défendre la cause du Hall of Famer dans cette élection, mais bien réducteur quand on regarde de plus près la saison de son équipe, 5e à l’Ouest après avoir longtemps lutté pour la place de dauphin des Lakers. 2009/2010 a été un bon exercice pour le Jazz qui termine avec le 7e bilan toutes conférences confondues.

Plus important que ses excellents résultats, le jeu pratiqué par le Jazz est la raison majeure qui m’a poussé à choisir Sloan pour cet award. Un jeu fluide qui implique la totalité de l’équipe, du meneur au pivot. Caractérisée par une circulation de la balle permanente grâce à des systèmes qui font confiance à chaque joueur présent sur le parquet, l’attaque de Utah est une parmi les plus efficaces de la NBA. Le fait que chaque membre de l’équipe soit impliqué nécessite une concentration permanente des acteurs qui doivent se sentir concernés sur chaque possession. Sloan donne de grandes responsabilités à son effectif, des plus âgés aux rookies. Wesley Matthews, débutant non drafté, a commencé 48 matches et en a disputé la totalité pour une moyenne de 9,4 points aux côtés de Deron Williams. On sent dans le jeu de Matthews une maturité qui n’émane que de peu de rookies, et une sobriété qui tranche avec les caractéristiques classiques du première année fou-fou qui apporte culot et audace. Celui du Jazz joue comme s’il était en NBA depuis des années, ce qui montre bien la capacité de Sloan à responsabiliser ses hommes afin de mettre son jeu en place. Cette implication maximale des joueurs n’est pas sans rappeler le football total batave des 70’s.

On dira alors, facile d’offrir un jeu aussi audacieux quand on dispose d’un bon effectif. Il est vrai qu’avoir LE meneur qui sait le mieux diriger le jeu sans avoir la gonfle collée aux mains aide dans la mise en place d’un tel projet. Deron Williams est le joueur idéal dans l’optique de Sloan, qui mise également beaucoup sur son entente avec Boozer en pick’n’roll. Un axe meneur-power all-star, beaucoup de coachs n’ont pas cette chance. Pourtant, le roster du Jazz n’est pas si impressionnant qu’on veut bien le croire. En manque de liquidités, les dirigeants ont lâché sans contrepartie un des piliers de l’équipe, Ronnie Brewer, qui apportait autant par sa défense que par sa connaissance de systèmes qu’il effectuait depuis 4 ans. Le prometteur Eric Maynor, drafté en 20e position a lui aussi été prié de faire ses valises malgré le sérieux de ses prestations en tant que back-up de Williams et la considération que Sloan avait pour lui. Ajoutons à cela les blessures récurrentes au sein d’une équipe où seuls deux joueurs ont réussi à disputer la totalité des matches cette saison. Kirilenko n’a pris part qu’à 58 matches qui ne lui ont pas permis de retrouver son meilleur niveau même si sa présence a fait un bien fou à l’équipe. A nouveau blessé pour les playoffs, tout comme Mehmet Okur, il s’ajoute à la liste de tuiles à laquelle Jerry Sloan a dû faire face. Malgré tout ça, le Jazz termine sa saison régulière avec une étiquette d’outsider plus que sérieux. Merci qui ? Pour un trophée qui a souvent récompensé le coach de l’équipe surprise de la saison à défaut de d’offrir le MVP à son leader, le stratège du Jazz mérite une candidature plus que sérieuse.

Au-delà du jeu pratiqué et de ce que Sloan arrive à tirer de son effectif, on se doit de souligner la présence du Jazz dans tous les domaines basketballistiques. Non seulement son équipe pratique le jeu le plus collectif de la NBA, comptant la meilleure moyenne de passes décisives par match sans pour autant pratiquer un jeu up-tempo (9e rythme en NBA), ce qui donne un hallucinant 67,8% de paniers résultants d’une passe décisive. Plus de deux tiers, ce qui démontre bien l’efficacité des systèmes Sloan. Qui peut se targuer de shooter à plus de 49% en se basant sur de l’attaque placée ? Personne. L’équilibre entre attaque et défense n’est pas en reste, le Jazz étant la 4e attaque et la 12e défense de la ligue, entraînant la 3e plus haute marge de victoire moyenne. N’en jetez plus. Ce savant mélange d’efficacité offensive et de sérieux défensif permet au Jazz d’atteindre une fois encore les playoffs sous les ordres de son génial entraîneur.

Les chiffres parlent tous en faveur de Jerry Sloan, la qualité du basket qu’il propose aussi. Si l’Energy Solutions Arena est une des salles les plus redoutées de la ligue, ce n’est pas un hasard. Les fans ne s’y trompent pas et savent qu’en venant ils auront le droit à une démonstration de haut niveau de la part d’une équipe drivée par le même coach depuis 21 ans. Si tout cela ne vous a pas convaincu de choisir Jerry Sloan pour le Coach of the Year, j’ajouterais qu’il est Hall of Famer, qu’il a gagné 1190 matches mais qu’il ne l’a jamais eu, bouh, c’est trop pas juste. Non, en fait c’est définitivement vraiment pourri comme argument, si je vous ai pas convaincus, relisez depuis le début autant de fois qu’il le faudra.


TRUE NBA AWARDS :

True Executive of the Year : John Hammond

True Most Improved Player : Russell Westbrook

dimanche 18 avril 2010

TRUE EXECUTIVE OF THE YEAR : JOHN HAMMOND





Il est arrivé il y a deux ans avec Scott Skiles dans ses valises. Etape par étape, John Hammond a reconstruit son roster pour que Milwaukee retrouve sa place en playoffs. Et forcément, comme dans tous les films qui finissent bien, ça commence mal. Départ de Mo Williams durant l’été 2008, obtention de Richard Jefferson. Tandis que le néo-Cavalier fête sa première sélection au all-star game et le meilleur bilan de la ligue, les Bucks traversent une saison anonyme de plus, à l’image de Jefferson qui malgré des stats conformes à son statut parvient à se faire complètement oublier. Oui, ça part très mal déjà.

Eté 2009, trois des meilleurs éléments de l’équipe se font la malle. Jefferson part bronzer sous le soleil texan après la terne saison des Bucks, qui sera sans doute la seule qu’il disputera sous le maillot olive. Échec sur toute la ligne pour Hammond. Le prometteur Ramon Sessions refuse une prolongation de contrat et part lui aussi à l’Ouest, laissant un record de franchise de 24 passes décisives et le seul Ridnour à la mène. Rare satisfaction de la saison, Charlie Villanueva va piocher dans la grasse enveloppe des Pistons où il touchera 40 millions sur 5 ans. Restent le franchise player Michael Redd et le premier choix de la draft 2005 Andrew Bogut, qui ont joué à eux deux 69 matches pendant la saison régulière. Effectivement, rien ne laisse présager des coups de maître du GM de Bucks qui se sont littéralement fait piller.

De toute façon, pour remettre son équipe sous le feu des projecteurs, Hammond va devoir tenter des paris. Il commence à la draft. Brandon Jennings, au potentiel aussi gigantesque que les doutes qui planent sur lui, commence à flipper dans la green room. Aucun GM ne veut de lui, pas même à New York malgré le fait que Stephen Curry ait déjà reçu sa casquette. Lui qui aurait parfaitement collé avec Mike D’Antoni s’est fait griller. Ça pue la honte pour le meneur de Rome. Trop risqué de prendre un joueur sur lequel on n'a aucune certitude. Hammond ose et utilise son 10th pick pour la plus grosse interrogation de cette draft. Après tout, la promotion de cette année est dite faible, donc autant essayer. Une fois son nom annoncé, Jennings se fait remarquer en arrivant à la bourre. Les autres GMs se marrent, Hammond s’est sûrement encore planté.

Malgré l’ajout d’Hakim Warrick, combo forward intéressant qui compense son manque de poids par son agressivité, les Bucks version 09/10 s’annoncent une fois de plus comme un mauvais cru, mais Hammond reste fidèle à ses choix. Ersan Ilyasova, drafté 4 ans auparavant va revenir d’Europe pour enrichir le roster, et Scott Skiles restera coach. Et là, surprise. Malgré un Redd toujours à l’infirmerie, Milwaukee part en trombe. Jennings après avoir enflammé les Summer Leagues fait péter les compteurs en NBA, passant à une passe et un rebond d’un triple-double pour son premier match et sortant une perf d’anthologie qu’il est inutile de rappeler. Andrew Bogut en forme monte en puissance au fil des matches, Luc Mbah a Moute drafté l’année précédente s’affirme comme un défenseur très solide, Ilyasova confirme que sa technique individuelle peut lui permettre de réussir en NBA, Ridnour se montre efficace en back-up et forme un One-Two punch destructeur avec Jennings. Les Bucks pointent à 8 victoires pour 3 défaites après 11 matches et Redd doit encore revenir. On se prend à rêver du côté de Milwaukee.

Redd passe comme un fantôme, jouant quelques matches avant de se blesser à nouveau, comme trop souvent malheureusement. Redd n’a jamais été réellement un joueur sur qui fonder une franchise, comme la plupart des shooteurs. Se baser sur l’adresse extérieure est un pari trop risqué pour guider une équipe. Si le franchise player n’est pas dedans, il ne va même pas pouvoir limiter la casse vu qu’il doit continuer à shooter pour remettre la machine en route. Même si Redd ou Ray Allen ont fait d’excellentes saisons à la tête de leurs franchises respectives, ce genre de joueur est bien plus efficace en tant que lieutenant d’une autre star. Enfin bref, revenons à nos Bucks.

Redd se blesse, donc, et avec lui disparaît l’espoir du compagnon de backcourt idéal pour un Jennings en perte de vitesse et harcelé par les défenses. Hammond doit faire quelque chose, ses Bucks s’éloignent un peu plus des playoffs chaque jour. Nouveau pari, l’ajout au roster de Jerry Stackhouse, ex-scoreur fou des Pistons qui aura pour tâche d’apporter au backcourt la puissance de feu offensive qui devait être celle de Redd. Evidemment, Stackhouse est bien loin de son niveau d’antan et n’apportera pas l’écot de points du médaillé d’Or olympique, mais Hammond n’a pas grand-chose à perdre avec le recrutement du Stack. Les Bucks freinent un peu leur chute, mais ne sont toujours pas au niveau de leurs ambitions de début de saison tandis que le peloton pour les playoffs se réduit de plus en plus.

La trade deadline se rapproche, et le GM des Bucks va réussir un nouveau coup pour relancer son équipe. Jennings est rattrapé par l’irrégularité de son shoot, un arrière plus explosif que Stackhouse s’impose donc. A la surprise générale, Hammond va se tourner vers John Salmons de Chicago. L’ancien King est plus que contesté du fait de ses performances en dents de scie qui pénalisent l’équipe et se débarrasser de son contrat sera un plus pour tenter de choper un free agent l’été prochain. Les Bulls se laissent tenter par un package comprenant le bide Joe Alexander et Hakim Warrick. Déçu par les performances de l’ex-Grizzly, Hammond n’éprouve aucun remords à se séparer d’un joueur qui n’aura jamais franchi le palier qui sépare le back-up utile du starter régulier. Comme Jefferson, Warrick n’a pas convaincu le GM des Bucks, et est donc prié de faire ses valises.

L’arrivée de Salmons est une vraie révolution. Même si Jennings ne retrouve pas son niveau du début de saison, il joue plus juste tandis que le nouveau venu s’impose comme le leader offensif des lignes arrières avec 20 points de moyenne en 30 matches. Les Bucks finissent la saison en trombe sur un 22-8, chatouillent les pointures de l’Est et de l’Ouest mais échouent à la 6ème place après une nouvelle blessure de Bogut en fin de saison. Au final, un bilan de 46 victoires pour 36 défaites qui tranche avec le chemin de croix qu’on leur prédisait.

Pour les départs de l’été, Jefferson a été un des plus gros flops de la saison à San Antonio, ne parvenant jamais à s’intégrer au jeu placé des Spurs. Sessions en tant que back-up de Johnny Flynn a vécu une saison aussi pourrie sur le plan individuel que celle des T'Wolves au niveau des résultats. Quand à Charlie V, la non-participation aux playoffs des Pistons et l’argent que ces derniers ont dépensé cet été condamnent la franchise à quelques années de galère. Hammond s’est séparé de ces trois joueurs quasiment sans contrepartie, et tous trois se sont gaufrés pendant que les Bucks finissaient avec leur meilleur bilan depuis 2001.

Le GM de Milwaukee n’a pas hésité à se séparer des ses meilleurs éléments ni à tenter des paris risqués comme le choix de Brandon Jennings. Il a gardé foi en les éléments qu’il jugeait dignes de sa confiance permettant l’éclosion de quelques joueurs intéressants, mais a surtout montré une réactivité hallucinante face aux mauvaises passes de son équipe. Quand les Bucks ont commencé à galérer, il a tenté Stackhouse. Quand les playoffs s’éloignaient, il a ramené Salmons. Son équipe termine avec 12 victoires de plus que la saison précédente et s’est qualifiée pour les playoffs. Si Jennings et Skiles sont souvent cités pour des trophées individuels, je tiens à décerner celui-ci à Hammond pour sa prise de risque, sa confiance et sa capacité à réagir.


TRUE NBA AWARDS : True Most Improved Player : Russell Westbrook

TRUE MOST IMPROVED PLAYER : RUSSELL WESTBROOK





Le MIP de cette saison ne saurait être un autre joueur que Kevin Durant. Passé du niveau all-star au niveau MVP, sans doute l’évolution personnelle la plus difficile, que ce soit dans les stats -meilleur scoreur, n°1 aux lancers tentés et rentrés- ou dans le jeu, Durant est devenu la superstar attendue, et ce dès ses 21 ans. Mais décerner cette récompense à un joueur qui a atteint un calibre largement MVP serait lui faire injure. C’est pourquoi j’ai choisi son coéquipier à Oklahoma City, Russell Westbrook. Choix peut-être surprenant, étant donné que le sophomore n’a pas vraiment vu ses stats exploser cette saison, à l’inverse d’un autre meneur dont le nom revient souvent quand on évoque cette récompense, Aaron Brooks.

Pourtant, si le Texan a vu son rendement statistique évoluer en même temps que son temps de jeu, peut-on vraiment dire qu’il ait progressé ? Brooks était déjà un très bon joueur l’an dernier, qui shootait bien derrière l’arc et qui savait driver une équipe. Cette saison a davantage vu une confirmation que de réels progrès, ses chiffres étant plus ou moins similaires à ceux de ses derniers playoffs. Oui, Brooks a su tirer profit de la confiance que Rick Adelman lui a accordée suite à sa bonne postseason. Oui, il a vu ses chiffres augmenter dans toutes les catégories statistiques. Mais ce joueur évoluait déjà à ce niveau l’an dernier, à la différence que cette saison, les Rockets ne seront pas en playoffs.

Westbrook n’a lui pas réellement vu d’évolution notable en termes de présence sur le parquet, en revanche sa présence dans le jeu a elle totalement changé. L'ancien de UCLA est devenu un autre joueur, plus mature surtout. Petit rappel : juin 2009, les dirigeants oklahomans ont le 3d pick de la draft, Ricky Rubio est encore disponible. Ils préfèrent faire confiance à Westbrook au poste de meneur, lui qui est plutôt un combo guard scoreur, et sélectionnent l’arrière James Harden en lieu et place du meneur prodige espagnol. Le message est clair : Russell sera leur meneur dans les années à venir, ils croient en lui et en ses progrès potentiels à ce poste. 9 mois plus tard, leur bébé arrive à maturité : Westbrook s’est montré digne de leur confiance, jouant moins perso, malgré des qualités évidentes en terme de scoring, pour s’effacer au profit de Kevin Durant avec le succès qu’on sait.

Niveau statistique, pas de révolution, si ce n’est une hausse de son pourcentage aux shoots, ou encore 2,7 passes de plus. Plus remarquable, une baisse de sa moyenne de pertes de balle, son péché mignon l’an dernier, malgré un temps de jeu supérieur. Westbrook joue plus juste, est plus efficace, est plus meneur tout simplement. Au cours des premiers mois de la saison Durant a canalisé les folies offensives de son cadet de par son statut, mais Westbrook n’en a plus besoin : il est devenu un joueur réfléchi et pointe maintenant son long nez parmi les top meneurs de la ligue. C’est donc pour cette évolution dans la gestion et la compréhension du jeu que je fais de Russell mon Most Improved Player pour cette année.

Dans le même registre, j’aurais pu nommer Zach Randolph, devenu un vrai équipier à Memphis en lieu et place du soliste qu’il a toujours été -exception faite de New York juste avant son rapide trade. Mais peut-on vraiment donner une telle récompense à un joueur qui s'affiche avec des stats de all-star depuis 8 ans ? Mention aussi à Andrew Bogut, car même si on pouvait s’attendre à ce genre de statistiques si l'Australien restait entier pendant une saison entière, son importance défensive a été plus importante que je ne me l’imaginais, au point qu’il termine deuxième à la moyenne de contres derrière Howard. Offensivement, Bogut a le plus beau hook de toute la ligue, mais ça on le savait déjà.

Pour résumer la différence entre ces trois joueurs et d’autres candidats au MIP, je dirais qu’à défaut de progresser statistiquement aussi sensiblement, eux ont progressé dans leur rôle de basketteur. Même avec plus de temps de jeu, Brooks a fait du Brooks, Gasol a fait du Gasol et Noah a fait du Noah. Aucun d’entre eux n’a réellement changé alors que Westbrook est devenu un autre joueur, un meilleur joueur. Le meneur d'OKC est donc pour moi le joueur ayant le plus progressé, et ce n'est pas une coïncidence si son équipe a le meilleur bilan parmi tous les joueurs cités ci-dessus.

lundi 12 avril 2010

MON NOM EST PERSONNE



A peine l’entre-deux joué, il me colle déjà. Une vraie sangsue. Le match vient de commencer et je suis obligé de me donner à fond rien que pour pouvoir me démarquer. C’est bon, j’ai la balle, mais il me rentre dedans. Une faute sur lui, c’est bien, il va me foutre la paix maintenant. Remise en jeu, il me percute une nouvelle fois, mais pas de coup de sifflet. Ca commence à m’énerver, prochaine action je lui rentre un shoot sur la tête, il va comprendre à qui il se frotte. Les déplacements des joueurs, je m’en tape. Il faut que je lui mette ce shoot dessus. Raté. Contre-attaque, il m’enrhume méchamment et craque un dunk tranquille. Il faut pas que je me laisse bouffer comme ça. Cette fois, j’attaque le cercle direct. Il m’envoie le cul par terre avant même que j’ai pu faire un pas. Remise en jeu. 3e faute, ce coup-ci j’en suis débarrassé pour de bon. Quoi ? Il reste sur le terrain ? Il va être long ce match…

Mais au fait, c’est qui lui ? Il peut prendre différents noms. Arron Afflalo, Trevor Ariza, Dahntay Jones, Nicolas Batum… Contrairement aux défenseurs bien connus des cadors de la ligue, ils ne vont pas garder la star adverse tout le match. Ils vont jouer une vingtaine de minutes, peut-être plus, et ils peuvent se donner à fond du début à la fin. Pire, sachant qu’ils ne vont passer que la moitié du match sur le parquet, ils peuvent en prendre des fautes, ils s’en foutent. Finale de conférence Ouest, l’an dernier, Jones défend sur Bryant. Au bout de 3 minutes il sort pour 4 fautes. Et alors ? Son but, c’est d’empêcher Kobe de rentrer dans son match. S’il est dans le starting five, c’est simplement pour que JR Smith puisse sortir du banc. Du coup, il sait que Smith va rester une demi-heure et lui pas longtemps. Il se dépense sans compter, et peut se permettre quelques coups d’éclats en attaque vu que personne ne s’occupe de lui.

Ce type de joueur complète souvent son agressivité et sa bonne défense homme-à-homme par une qualité offensive que personne ne connaît en dehors de son équipe. Super shooteur à 3 points pour l’un, attaque de cercle surpuissante pour l’autre. Sur un soir, ça peut donner une avalanche de tirs longue distance qui vient de nulle part, ou une réussite aux tirs hallucinante suite à 5 ou 6 dunks sans opposition. Car pour le coach adverse, quelle stratégie adopter ? Beaubois commence à prendre feu derrière l’arc, quelle va être ma décision ? Si je défends plus sévèrement sur lui, je laisse Terry ou Butler libres, et eux ne vont pas me rater. Si je laisse les choses telles quelles, qui sait s’il n’est pas capable de continuer à planter toute la soirée ? Et bien souvent, on choisit de ne pas inquiéter cet inconnu, et tant pis s’il sort le match de sa vie. Rodrigue Beaubois, 27 mars 2010 : 40 points en moins d’une demi-heure avec 9 tirs primés, record rookie.

Évidemment, ça ne va pas se passer comme ça tous les soirs. Sinon tous ces joueurs seraient déjà des all-stars. Mais leur apport sur de courtes séquences n’a pas de prix en playoffs. Les Lakers vont probablement l’apprendre à leurs dépens. Ils ont lâché Trevor Ariza pour Ron Artest, mais malgré des qualités similaires, grosse défense sur l’homme, bons shooteurs et athlétiques, les deux ailiers sont totalement différents dans leur apport. Artest, c’est de la défense tout le match, et une implication dans les systèmes offensifs. Ariza, c’est coller la star adverse en défense, quitte à faire quelques fautes, ce qu’Artest ne peut pas se permettre vu qu’il doit être présent tout le match et surtout dans le money time. Ariza peut se permettre d’être sorti avant la fin des 48 minutes, ce qui lui permet d’utiliser à fond ses qualités athlétiques face à une défense qui ne se méfie pas, d’où des shoots longues distance assassins, parfois dans les moments-clés, mais aussi des dunks qui ne souffrent d’aucune contestation.

Après, niveau défense indiv’, Artest est bien au-dessus du feu follet qui officie maintenant du côté de Houston. Mais le fait d’être si reconnu au sein de la ligue pour cet aspect de son jeu rend les adversaires plus méfiants, ce qui n’était pas le cas pour un joueur comme Ariza au cours de la dernière postseason. Bien sur, avoir un défenseur de la trempe d’Artest est une plus-value incroyable face à une équipe guidée par un scoreur de haut niveau. Mais se priver du rendement séquentiel d’un facteur X athlétique est un tort qu’on paye tôt ou tard en playoffs. Même si celui-ci est cantonné à un rôle ingrat de chien de garde/coups de putes pour empêcher la menace offensive adverse de rentrer dans son match, même s’il n’est qu’un faire-valoir pour qu’un 6th man sorte du banc jouer autant qu’un titulaire, même si son apport au scoring peut être énorme un soir et minable le lendemain, ce joueur pèse sur une série. Le chien de garde du franchise player peut se faire bouffer à chaque match -RIP Tayshaun Prince- et précipiter la chute de son équipe, alors que si Dahntay Jones se prend 4 fautes en un quart-temps, le cours de la partie ne va pas en être radicalement changé.

Il n’y a pas vraiment d’appellation particulière pour ce type de joueur. On dit souvent "facteur X", mais je pense que cette expression ne retranscrit que les stats soudaines qu’un gars peut sortir de nulle part, et pas le travail de l’ombre qui est le sien chaque soir : se donner à fond pour pourrir les adversaires des deux côtés du terrain et surtout défensivement au début du match. Martell Webster des Blazers est un facteur X : il peut prendre feu d’une minute à l’autre, genre mettre un 3 points ultra-clutch après avoir raté 8 tirs de suite. C’est son taf, prendre des tirs, et après inch’Allah, on verra bien si ce soir ça rentre. Le type de joueur dont je parle peut faire ce genre de perf, mais sa tâche première c’est de défendre. Afflalo, c’est 44% à 3 points, JR Smith 34%. Pourtant, Smith prend 2 fois plus de shoots et 2 fois plus de shoots derrière l’arc que son compère. Tout simplement parce qu’Afflalo n’est pas là pour shooter, même s’il sait le faire. Il est là pour défendre et permettre à Smith de sortir du banc. Ce rôle aussi ingrat que primordial mérite bien plus de considération que celui de "facteur X".

Je pourrais proposer un nom pour le taf que font tous ces joueurs, mais j’ai pas super envie. Peut-être une autre fois. Ici, un simple rappel du boulot qu’ils abattent tous les soirs, et de leur importance au sein d’un collectif. Chacun son rôle, même si tu as le plus moche, tu le fais à fond. Rien à perdre. Et au final, ce seront peut-être eux les héros d’une série de playoffs. Une interception décisive, un shoot assassin… Qui sait ? En tous cas, pendant que les stars s’occupent de la finition, du clinquant, ils bossent sur le sale et mettent les mains dans la merde pour apporter leur pierre à l’édifice d’une épopée post-saisonnière quand d’autres empilent les briques plutôt que les points. Rendez-vous en playoffs, on verra bien à la sueur de quels fronts seront gagnées les bagues.